Echantillonneurs passifs : DGT, SPMD, etc.
Le 6 février 2008, un séminaire a eu lieu sur le thème des échantillonneurs passifs et des méthodes alternatives
de prélèvement. Ce séminaire a été organisé par le Cemagref et il s’inscrit dans le cadre du programme de travail d’AQUAREF. Il s’est tenu au Cemagref de Bordeaux (Cestas). Source : lien
Contexte
Les techniques d’échantillonnage dites passives (échantillonneurs "passifs" ou "intégratifs") telles que les « Diffusive Gradient in Thin Film » (DGT), les «
Semi-Permeable Membrane Devices » (SPMD) et, plus récemment, les « Polar Organic Chemical Integrative Sampler » (POCIS) ont été développées afin d‘extraire directement in situ les
contaminants à l’état de traces dans le milieu aquatique (eaux et sédiments). Ces techniques pré-concentrent les contaminants et aboutissent à un échantillonnage intégré dans le temps. Elles
permettent ainsi de mieux caractériser l’exposition in situ des organismes. Certains dispositifs du type SPMD et DGT permettent de mimer la bioaccumulation et d’accéder, dans une
certaine mesure, à la fraction biodisponible des contaminants. Ces techniques sont en fort développement depuis une quinzaine d’année avec la conception de nouveaux dispositifs et la meilleure
compréhension des mécanismes impliqués dans l’échantillonnage passif.
Objectifs du séminaire
Ce séminaire
aborde les aspects techniques et théoriques de l’échantillonnage passif : types de dispositifs, domaines d'application, limites et intérêts, développements méthodologiques, outils de screening,
approches quantitatives et amélioration de la représentativité in situ, modélisation et compréhension des mécanismes, etc. Des applications environnementales in situ sont présentées (ex :
couplage entre l’échantillonnage intégré et les bioessais, essais interlaboratoires). Les présentations couvrent les principaux dispositifs (SPMD, DGT, POCIS et SBSE (Stir bar sorptive
extraction)) avec un rappel des généralités (bref état de l’art) et l’exposé d’applications et de développements récents et innovants. Ce séminaire s’adresse aux chercheurs et étudiants ainsi
qu’aux utilisateurs finaux (ex : réseaux de surveillance DCE). Il fait suite au premier séminaire sur « les échantillonneurs intégratifs de terrain appliqués aux contaminants organiques »
organisé au Cemagref de Lyon le 23 novembre 2005. Ce séminaire a été organisé par le Cemagref et il s’inscrit dans le cadre du programme de travail d’AQUAREF. Il s’est tenu le 6 février 2008 au
Cemagref de Bordeaux (Cestas) et 52 personnes ont participé.
Discussions
Déploiement in situ, représentativité et
aspects quantitatifs
Le déploiement des échantillonneurs passifs sur des longues périodes en milieu marin provoque généralement, en plus du biofouling, la détérioration, voire la destruction des membranes. Ceci
limite la durée d’exposition dans ce type de milieux (présentations de Togola et al., et de Gonzalez et al.).
Lors d’expositions plus courtes ou dans des eaux douces et peu turbides, la plupart des échantillonneurs passifs, et plus particulièrement les SPMD, les LDPE (low-density polyethylene) et les
DGT, sont tout de même affectés par le biofouling. Concernant les SPMD et les LDPE, les composés de référence et de performance (PRC) permettent de corriger l’impact du biofouling sur les taux
d’échantillonnage et d’améliorer les résultats quantitatifs (présentations de Kuhn et Gourlay, et de Tixier et al.). Toutefois la difficulté réside dans le choix des PRC adéquats afin de
couvrir une gamme de log Kow suffisamment étendue et représentative des composés échantillonnés. A noter que les PRC ne permettent que l’amélioration de la justesse et non de la
fidélité de la mesure.
Opérationalité et pré-normalisation de certaines techniques
D’un point de vue quantitatif, la comparaison entre les techniques classiques d’extraction et les échantillonneurs passifs est parfois délicate. En effet, les techniques de référence de
préparation des échantillons (filtration, SPE, etc.) peuvent amener à isoler et à analyser des fractions différentes de celles échantillonnées par les dispositifs (seuils de coupure et affinité
différents par exemple).
De plus, pour des composés hydrophobes, la biodisponibilité réelle des contaminants et la fraction échantillonnée par des dispositifs du type SPMD et LDPE ne
sont pas toujours corrélées et dépendent de la matrice (teneurs en MES, en acides humiques, etc.). On emploie par exemple le terme SPMD-disponible pour décrire la fraction échantillonnée
par ce type de dispositifs (présentation de Kuhn et Gourlay).
Les substances hydrophiles (résidus médicamenteux, hormones, pesticides) sont considérées comme étant essentiellement présentes dans la phase dissoute. Les POCIS, de par leur membrane hydrophile et microporeuse, échantillonnent cette phase et par extension la fraction biodisponible. Cependant, les travaux relatifs à la
caractérisation de la fraction échantillonnée par ces dispositifs et le lien avec la biodisponibilité n’ont pas été abordés. Les POCIS ont un domaine d’application plus large que ce que l’on
pensait initialement (donc pas seulement applicable pour les composés hydrophiles). Ils permettent de concentrer notablement certains composés et peuvent ainsi permettre d’identifier des composés
non ciblés, par exemple des métabolites (présentations de Mazzella et al., et Budzinski et al.).
Enfin, l’approche basée sur les PRC est actuellement peu développée pour les échantillonneurs passifs renfermant un adsorbant (POCIS, Chemcatchers). Comme pour les SPMD, l’utilisation d’un ou
plusieurs PRC est indispensable afin d’accéder à une estimation quantitative plus fiable des concentrations intégrées (présentation de Mazzella et al.). Il faut également noter une
application prometteuse couplant la fraction échantillonnée par les POCIS avec des biotests (présentation de Budzinski et al.). Au lieu de rechercher une liste de composés prédéfinie à
l’avance, cette approche permet d’isoler des substances selon leur activité ou mode d’action sur les organismes (par exemple les perturbateurs endocriniens) puis de les
identifier.
On
peut dire qu’à l’heure actuelle ces outils permettent d’obtenir des informations semiquantitatives sur les concentrations de certains contaminants dans les eaux douces, marines et eaux usées.
Ils ne sont donc pas encore applicables pour la surveillance DCE (au sens « stricte ») mais peuvent être complémentaires des outils de surveillance classiques. Dans le cas de la mesure des
pesticides dans les eaux de surface, des essais sont en cours pour comparer les concentrations évaluées par POCIS avec celles mesurées par des échantillonnages ponctuels ou hebdomadaires (Cf.
Mazzella et al.) afin d’apporter des éléments sur la « validation » in situ de ces dispositifs. Dans le cas des substances pharmaceutiques, des essais en laboratoire pour vérifier
l’effet des conditions du milieu (ex : vitesse de courant, température, salinité) ont montré que les variations de concentrations restaient dans une gamme raisonnable (facteur 5 au maximum)
(Cf. Budzinski et al).
Les applications des échantillonneurs passifs pour évaluer la contamination des sédiments sont plus rares et semble t-il plus difficiles à interpréter
(présentations Roulier et al., et Tixier et al.). Il serait pourtant important de démontrer l’applicabilité de tels outils pour avancer sur
la connaissance des apports secondaires de contaminants à partir des sédiments (ex : métaux, PCB).
Il serait utile que les développeurs de ces techniques produisent des fiches de description par outil de mesure, avec la
description du mode d’utilisation (mise en place concrète sur le terrain, durée d’exposition recommandée, etc.), de la validation effectuée, des molécules et type d’eaux ciblées
(domaine d’application), ainsi que des LQ et reproductibilité obtenues dans les conditions opératoires décrites. Ceci devrait être fait dans le cadre des travaux
d’AQUAREF.
La normalisation est une étape essentielle afin rendre les échantillonneurs passifs opérationnels dans le cadre des réseaux de surveillance et le suivi continu de la qualité
des milieux aquatiques. Une normalisation est en cours au niveau européen avec un projet basé sur le premier «Technical Guidance»-PAS 61 : 2006 (Grande-Bretagne) présenté par l’Université de
Portsmouth au BSI (présentation de Togola et al.). Il s’agit d’un guide assez général sur les précautions à prendre lors de la préparation, du
déploiement in situ et de la récupération des échantillonneurs passifs. Les aspects assurance et contrôle qualité sont explicités mais il n’y a aucune recommandation sur l’étalonnage et la
validation des dispositifs. De plus, le document ne détaille pas le fonctionnement et les spécificités des principaux échantillonneurs passifs existants (DGT, SPMD, POCIS, Chemcatchers, Mesco et
LDPE). Ce document devrait donc être complété pour être vraiment utile.
Une étude d’intercalibration relative aux LDPE en milieu marin (pour les HAP notamment) a été
présentée par Tixier et al. Ce type d’exercice pourrait être étendu à d’autres dispositifs dans le cadre d’une pré-normalisation. Des essais
sont prévus dans le cadre des activités de Quasimeme.
Le besoin d’organiser des essais d’intercomparaison en France a également été discuté : à organiser pour les couples
contaminants/outils les plus avancés. L’idée de la mise en place d’une plateforme expérimentale commune pour les essais des dispositifs (dispositifs avec alimentation en continue) est aussi
proposée, du fait du coût d’une telle structure.